Le veuvage
19. Le veuvage est une expérience
particulièrement difficile pour celui qui a
vécu le choix du mariage et de la vie
familiale comme un don. Cependant il peut,
sous le regard de la foi, être valorisé de
différentes façons. À partir du moment où
l’on se retrouve à vivre cette expérience,
certains savent utiliser leur énergie avec
encore plus d’implication pour leurs enfants
et leurs petits-enfants, trouvant dans cette
expression de l’amour une nouvelle mission
éducative. Le vide laissé par le conjoint
disparu est dans un certain sens rempli par
l’affection des proches qui valorisent les
personnes veuves, leur donnant de protéger
ainsi la mémoire si précieuse de leur
mariage. Ceux qui ne peuvent compter sur
la présence de proches à qui se consacrer et
dont ils peuvent recevoir affection et
attention, doivent être soutenus par la
communauté chrétienne avec une attention
et une disponibilité particulières, surtout
s’ils se trouvent dans une situation de
pauvreté. Les personnes veuves peuvent
célébrer une nouvelle union sacramentelle
sans rien enlever à la valeur de leur
précédent mariage (cf. 1 Co 7,39). Aux
débuts et au cours de son histoire, l’Église a
manifesté une attention toute particulière
envers les veuves (cf. 1 Ti 5,3-16), allant
jusqu’à instituer l’ordo viduarum (l’ordre
des veuves), qui pourrait être aujourd’hui
remis en pratique.
La joie d’amour Pape François 19 mars 2016
Quand la mort transperce de son aiguillon
253. Parfois la vie familiale est affectée par la mort d’un être cher. Nous ne pouvons pas nous lasser d’offrir la lumière de la foi afin d’accompagner les familles qui souffrent en ces moments.[280] Abandonner une famille lorsqu’un décès l’afflige serait un manque de miséricorde, perdre une opportunité pastorale, et cette attitude peut nous fermer les portes pour quelque autre initiative d’évangélisation.
254. Je comprends l’angoisse de celui qui a perdu une personne très aimée, un conjoint avec lequel il a partagé beaucoup de choses. Jésus lui-même s’est ému et s’est mis à pleurer lors de la veillée funèbre d’un ami (cf. Jn 11, 33.35). Et comment ne pas comprendre les pleurs de celui qui a perdu un enfant ? Car c’est « comme si le temps s’arrêtait : un précipice s’ouvre, qui engloutit le passé et aussi l’avenir […]. Parfois, on arrive même à en attribuer la faute à Dieu. Combien de personnes — je les comprends — [s’en prennent à] Dieu ».[281] « Le veuvage est une expérience particulièrement difficile [...]. Au moment où ils doivent en faire l’expérience, certains parviennent à reverser leurs énergies, avec plus de dévouement encore, sur leurs enfants et petits-enfants, trouvant dans cette expression d’amour une nouvelle mission éducative […]. Ceux qui ne peuvent pas compter sur la présence de membres de la famille, auxquels se consacrer et dont ils peuvent recevoir affection et proximité, doivent être soutenus par la communauté chrétienne avec une attention et une disponibilité particulières, surtout s’ils se trouvent dans des conditions d’indigence ». [282]
255. En général, le deuil pour les défunts peut durer longtemps, et lorsqu’un pasteur veut accompagner ce processus, il faut qu’il s’adapte aux besoins de chacune de ses étapes. Tout le processus est jalonné de questions, sur les causes de la mort, sur ce qu’on aurait dû faire, sur ce que vit une personne juste avant la mort. Grâce à un parcours sincère et patient de prière et de libération intérieure, la paix revient. À un certain moment du deuil, il faut aider à découvrir que nous qui avons perdu un être cher, nous avons encore une mission à accomplir, et que cela ne nous fait pas du bien de vouloir prolonger la souffrance, comme si elle constituait un hommage. La personne aimée n’a pas besoin de notre souffrance et ce n’est pas flatteur pour elle que nous ruinions nos vies. Ce n’est pas non plus la meilleure expression d’amour que de se souvenir d’elle et de la nommer à chaque instant, car c’est s’accrocher à un passé qui n’existe plus, au lieu d’aimer cet être réel qui maintenant est dans l’au-delà. Sa présence physique n’est plus possible, mais si la mort est une chose puissante, « l’amour est fort comme la mort » (Ct 8, 6). L’amour a une intuition qui lui permet d’écouter sans sons et de voir dans l’invisible. Il ne s’agit pas d’imaginer l’être aimé tel qu’il était, sans pouvoir l’accepter transformé, tel qu’il est à présent. Jésus ressuscité, lorsque son amie Marie a voulu l’embrasser de force, lui a demandé de ne pas le toucher (cf. Jn 20, 17), pour la conduire à une rencontre différente.
256. Nous sommes consolés de savoir que la destruction complète de ceux qui meurent n’existe pas, et la foi nous assure que le Ressuscité ne nous abandonnera jamais. Ainsi, nous pouvons empêcher la mort de « nous empoisonner la vie, de rendre vains nos liens d’affection, de nous faire tomber dans le vide le plus obscur ».[283] La Bible parle d’un Dieu qui nous a créés par amour, et qui nous a faits de telle manière que notre vie ne finit pas avec la mort (cf. Sg 3, 2-3). Saint Paul nous fait part d’une rencontre avec le Christ immédiatement après la mort : « J’ai le désir de m’en aller et d’être avec le Christ » (Ph 1, 23). Avec lui, après la mort, nous attend « ce que Dieu a préparé pour ceux qui l'aiment » (1 Co 2, 9). La préface de la Liturgie des défunts dit merveilleusement : « Si la loi de la mort nous afflige, la promesse de l’immortalité nous apporte la consolation. Car pour ceux qui meurent en toi, Seigneur, la vie n’est pas détruite, elle est transformée ». En effet « nos proches n’ont pas disparu dans l’obscurité du néant : l’espérance nous assure qu’ils sont entre les mains bonnes et fortes de Dieu ».[284]
257. Une façon de communiquer avec les proches décédés est de prier pour eux. [285] La Bible affirme que « prier pour les morts » est une pensée « sainte et pieuse » (2 M 12, 44-45). Prier pour eux « peut non seulement les aider mais aussi rendre efficace leur intercession en notre faveur ».[286] L’Apocalypse présente les martyrs intercédant pour ceux qui subissent l’injustice sur terre (cf. Ap 6, 9-11), solidaires de ce monde en chemin. Certains saints, avant de mourir, consolaient leurs proches en leur promettant qu’ils seraient proches pour les aider. Sainte Thérèse de Lisieux faisait part de son désir de passer son Ciel à continuer de faire du bien sur la terre.[287] Saint Dominique affirmait qu’« il serait plus utile après la mort […]. Plus puissant pour obtenir des grâces ».[288] Ce sont des liens d’amour,[289] car « l’union de ceux qui sont encore en chemin avec leurs frères qui se sont endormis dans la paix du Christ ne connaît pas la moindre intermittence ; au contraire, selon la foi constante de l’Église, cette union est renforcée par l’échange des biens spirituels ».[290]
258. Si nous acceptons la mort, nous pouvons nous y préparer. Le parcours est de grandir dans l’amour envers ceux qui cheminent avec nous, jusqu’au jour où « il n’y aura plus de mort, ni de pleur, ni de cri ni de peine » (Ap 21, 4). Ainsi, nous nous préparerons aussi à retrouver les proches qui sont morts. Tout comme Jésus a remis le fils qui était mort à sa mère (cf. Lc 7, 15), il en sera de même avec nous. Ne perdons pas notre énergie à rester des années et des années dans le passé. Mieux nous vivons sur cette terre, plus grand sera le bonheur que nous pourrons partager avec nos proches dans le ciel. Plus nous arriverons à mûrir et à grandir, plus nous pourrons leur apporter de belles choses au banquet céleste.
Extraits proposés à la méditation par la Fraternité Notre Dame de la Résurrection.
Pour aller plus loin :
Nicole Bruyelles 03 27 46 79 49 – nicbru@orange.fr – www.veuves-chretiennes.cef.fr-06 70 63 73 65